Greek Crisis

dimanche 24 octobre 2021

Dix ans de blog...



Dix ans de blog. J’ai initié GREEKCRISIS très exactement le 24 octobre 2011, en ces mêmes lieux comme en ce moment en Thessalie. Cependant, il est difficile de dire si cette démarche authentique est amusante ou en somme, plutôt... effrayante. Près de 900 articles plus loin, les lecteurs ont pu se faire une idée, d’ailleurs bien précise. La Grèce... est de la fête depuis dix ans, mais alors ce n’est qu’un paradigme quelque peu avant-gardiste parmi tant d’autres. Eschatologie sans fin ?

Le pays... est de la fête. Grèce Centrale, octobre 2021

Eschatologie donc. Ou, comme l’écrit dans un contexte suffisamment parallèle l’écrivain Pierre Michon dans “Rimbaud le fils”, “Le poète Izambard tient pour l'éternité la chaire de rhétorique au collège de Charleville, le professeur Izambard; il a pour toujours vingt-deux ans, sa vie longue est lettre morte, et les recueils que pourtant il composa et publia plus tard, c'est au regard du temps comme s'il avait pissé dans un violon”.

Pisser dans un violon ? Pas forcément. Notre monde est une machine qui se met à se défaire, machine d’ailleurs et autant machinerie. Par les temps qui courent, on ne saurait trop insister sur l’importance de la réinformation issue du terrain, si possible authentique.

Dix ans plus tard. Thessalie, octobre 2021

Déjà, à force de poursuivre les événements perdus, autrement-dit, ceux des perdants, nous avons gagné en clairvoyance dans notre analyse, de même que nos lecteurs, dont le quotidien n’est plus tellement le même qu’il y a dix ans. Et quant à l’emballage politique, ce n’est qu’un emballage tout court, et il est percé.

Il y a très exactement dix ans, j’écrivais entre autres ceci: “Ce soir les médias sont bien agités. Il y a de cheveux à tondre. On s'y prépare à Bruxelles... à tondre une partie de la dette grecque. Une partie seulement. Sur 300 milliards les 200 milliards en seront exclus. Le toilettage forcé concerne les banques et les caisses d'Assurance maladie et de Retraite du pays. Pas les actifs de la Banque Centrale Européenne par exemple”.

Taverne du dimanche. Grèce Centrale, octobre 2021

Ayant quitté Athènes pour quelques jours, je note ce silence accablant de la Grèce rurale. Les rues sont vides et les cafés ont perdu leur fréquentation. La sociabilité baisse ici aussi ses volets. Avant la Troïka, on paradait vraiment portant la richesse - petite ou provisoire peu importe - tout le monde avait à exhiber un nouvel achat”.

Désormais, lorsque le chômage et les faillites frappent les portes aussi des ruraux, ces dernières ne s'ouvrent plus pour les voisins, les cousins, les amis. Les petits villages ont néanmoins de bien grandes préoccupations. Il y a également la honte. Elle est énorme. Au moins, certains ont manifesté sur leurs tracteurs agricoles il y a quelques jours, lors de la grève générale en Grèce”.

Ville de Tríkala. Thessalie, octobre 2021

Ce village produit entre autres du maïs. Au lieu de vendre leur production aux coopératives et aux marchands locaux, les villageois ont dans leur majorité préféré un grossiste venu du Sud de la Grèce car il achetait un peu plus cher. Ayant payé les deux premiers parmi les producteurs, il est parti avec la récolte des autres sans laisser de traces”.

Depuis, c'est la désolation, les paysans ont perdu entre 15.000 et 50.000 euros chacun. Tout se dérègle. Certains villageois vendent désormais trop cher à leurs voisins retraites, les œufs et les poules. Temps de crise et de rapacité. La solidarité n'est pas innée, malgré ce que les Grecs peuvent raconter”.

Promotion... cosmétique du vélo. Tríkala octobre 2021

En 2021, les tavernes et les cafés sont assez fréquentés, mais il y en a moins de Grecs dans ce pays. Près de 800.000... indigènes l’ont ainsi quitté sous les effets de la dite crise. Ils ont été sitôt remplacés par deux à trois millions de migrants “sélectionnés”, c’est-à-dire, issus de pays musulmans, qui plus est, amis de la Turquie et au besoin instrumentalisés par Ankara.

Et quant à la célèbre dette grecque, en 2021, elle dépasse les 300 milliards d’euros, sauf que désormais tout le monde la trouve “normale et gérable”, en tout cas d’après les propos tenus à Bruxelles et à Berlin. Entre temps, parmi la fausse parenthèse SYRIZA et le reste des marionnettes aux commandes, la “politique” est comme on dit passée par là ; en réalité, il faut émettre qu’elle est passée tout court.

En cette ville Thessalienne. Tríkala, octobre 2021

En cette ville thessalienne à la saison pluvieuse des coings et du bois de chauffage, la municipalité aux mains des initiés, multiplie les initiatives de l’écologisme dont une certaine promotion... cosmétique du vélo, tout en offrant des “opportunités” aux seigneurs issus du côté obscur de la force techno-diabolique, c’est pour faire de Tríkala “un véritable espace branchée et autant multiculturel”.

Désormais, le chômage... fondamental et les faillites deviennent alors la norme, et voilà que les portes des ruraux s'ouvrent de nouveau pour les voisins, les cousins et les amis, il faut préciser, de manière bien sélective. Petits villages aux préoccupations comme on dit, courantes. D’ailleurs, la honte de la paupérisation d’il y a dix ans a aussi fait son temps. Tout le monde pratiquement est nivelé vers le bas ; ainsi, en ce dimanche sous la pluie, notre cousine nous a apporté de sa pâtisserie maison, en échange, nous lui avons offert de notre plat cuisiné au four.

Saison des coings. Thessalie, octobre 2021

Nous avons surtout mis en évidence nos solutions coordonnées pour nous chauffer et pour cuisiner au bois lors de la probable future grande coupure du courant électrique. Car à défaut de contre-solution immédiate vis-à-vis de la dernière... solution finalisée des initiés, ce que nous avons mis en évidence, tient si possible d’une syntaxe de la pensée et de la praxis, au niveau local et familial. Encore une fois, c’est en somme l’idiome qui se bat contre l’idiotie.

Car en cette Grèce encore assez rurale, le temps est aussi bien loin où certains manifestaient à bord de leurs engins agricoles ; les syndicats, y compris agricoles, gavés de l’argent du système ne représentent plus rien. Sauve qui peut et Grand Reset!

En vie rurale comme en vie urbaine. La dite promotion “des pratiques d’aménagement de la voirie et des espaces publics qui permettent un partage plus équilibré”, dont le dernier agencement du marché local qui se tient chaque jour à Tríkala, préfigure en réalité le dictat de l’Agenda 2030, ouvertement dévoilée par les marionnettes des ministères à Athènes. La mise en vente des fruits et des légumes sera à terme autorisée en exclusivité pour des sociétés anonymes... donc contre les producteurs locaux ; eux, toujours éponymes.

La chatte et son petit. Tríkala, octobre 2021

Sauve qui peut, mais pour l’instant sur le marché à Tríkala, à part nos producteurs issus de nos rangs locaux et parfois même familiaux, on y rencontre encore ces chattes faisant l’apprentissage du combat et de l’affrontement à leurs jeunes chatons. C’est une évidence comme on sait de la vie, ou à défaut de la mort.

Dix ans de blog, la démarche demeure il faut dire épuisante. Depuis sa création en octobre 2011, le blog s'est débattu en permanence dans des problèmes d'ordre matériel. Ces problèmes, nous le savons, sont normaux lorsqu'il s'agit d'une œuvre de réinformation et d'analyse, d’ailleurs mise à l'index du réseau des initiés qui règlent d'habitude, par l'octroi des fonds, le sort des idées encore authentiques et surtout libres.

Chat qui pêche. Grèce Centrale, octobre 2021

Malgré ces difficultés, GREEKCRISIS a tenu contre vents et marées; également contre le découragement. Et d’abord, c’est grâce au travail de fourmi de mon ami Kéndavros, ami de longue date et informaticien de la toute première garde des codes et des macros, que ce blog doit toute son existence en matière technique. Qu’il soit remercié de tout cœur.

Et autant, nos lecteurs, nos amis n'ont cessé de nous apporter le soutien moral et matériel qui nous a permis de continuer jusqu'ici. Mais, si ce soutien fut assidu, fervent, il n'a pas été assez large et systématique pour aider ce blog à faire face à ses difficultés, aux exigences matérielles croissantes.

Nous faisons donc régulièrement appel à tous nos lecteurs, à tous les amis, à tous ceux qui sont concernés par notre démarche pour qu'ils nous aident à exister.

Café en terrasse. Tríkala, octobre 2021

Nous avons alors tant bu à la tasse et... le café de la décennie pour ce pauvre blog est plutôt amer. Il y a dix ans, nous pouvions encore fréquenter un établissement et s’asseoir librement entre ses murs, pour prendre de la sorte toute la mesure du temps social et parfois même y rédiger nos articles. Plus maintenant. Partout en Grèce et sauf pour l’instant en terrasse, il en faut un passe dit “sanitaire”, en réalité, il s’agit d’un passe-partout de bonne conduite sociale et politique.

Dix ans de blog pourtant ça se fête... peut-être !

Car ce survol du dernier spectacle du monde grec depuis dix ans de totalitarisme métapolitique galopant nous ramène, on le voit, au point initial des affaires humaines, ce que nos Anciens n’ignoraient déjà point. La connaissance du tragique, de l’Hybris, de la Catharsis, autant de passages, supposons-le, toujours obligés entre la vie et la mort, y compris pour les sociétés et pour leurs civilisations.

Temps nouveaux, mais temps déjà anciens. J’ai initié GREEKCRISIS il y très exactement dix ans en ces mêmes lieux en Thessalie et peut-être bien, ce blog restera résolu à poursuivre dans la voie qui est la sienne. Eschatologie sans fin?
Hermès et Mimi de Greekcrisis. Thessalie, octobre 2021

* Photo de couverture: Pisser... dans un violon. Tríkala, octobre 2021