Greek Crisis

samedi 25 juillet 2020

Feu



Soudainement, le feu. Et d’abord, les hurlements des sirènes des pompiers du coin, hier à l’heure du repas de midi, c’est à-dire vers 14 heures dans les usages grecs. Nous voilà, à notre tour, touchés par une certaine actualité. Un seul foyer de départ et pour une fois, notre incendie... bien à nous est comme dit accidentel.

Nous l'observions avaler la montagne. Péloponnèse, juillet 2020

Nous l'observions alors avaler la montagne, descendant sur notre bourgade, touchant même les premières maisons. Nous savions que c’était une affaire d’environ dix minutes... pour nous traverser, sans l’intervention des moyens aériens. Les agents du Commissariat local ont fait évacuer habitants et estivants de la partie la plus menacée de la localité, nous étions ainsi tous évacués sur le port et sur la marina, près de la mer salvatrice.

Certains maudissait la municipalité historique pour sa supposée négligence “car il n’y a pas de chemin d’accès sur cette hauteur si proche des habitations”, d’autres trouvaient surtout le temps bien long avant l’arrivée des Canadair et de l’hélicoptère. “Oh... voilà que les flammes touchent désormais la maison de Tákis, le stade de football ainsi que le collège mitoyen. Mon Dieu...”

Une femme s’est souvenue de Pandelís, cet instituteur mis à la retraite il y a longtemps, dont l’esprit n’est plus tout à fait à sa place, “le pauvre, il faut le sortir de chez lui, il n’a plus son esprit et il ne bougera pas de sa chambre...” Un agent de la municipalité et deux policiers se sont immédiatement rendus chez Pandelís, soulagement.

Depuis le port et la marina, on observait alors le feu, impuissants ; respirant déjà les premières fumées. Même notre Bellerophontès, non pas le héros de jadis et de Corinthe, mais celui bien de chez nous, d’abord indifférent à l’agitation des humains, il est parti se cacher par la suite quelque part, sentant autant l’haleine du feu.

Les moyens aériens sont enfin arrivés. Péloponnèse, juillet 2020

On observait alors le feu, impuissants. Péloponnèse, juillet 2020

Bellerophontès, d’abord indifférent... Péloponnèse, juillet 2020

Les moyens aériens sont enfin arrivés, juste à temps. Nous avons eu la chance d’avoir l’Attique en face, surtout et d’abord, ensuite, le grand incendie qui sévit encore près de Corinthe n’est guère loin, les Canadair et les hélicoptères se trouvaient déjà dans la zone.

Les habitants applaudissaient alors leurs descentes, ils saluaient même les pilotes. “Ah voilà, la maison de mon cousin Tákis semble sauvée, les flammes ont reculé grâce à l’avion.” La bataille... aérienne a duré près de trois heures. Progressivement, la tension s’est mise à baisser. Les cris ont cessé, autant que les critiques. Le feu étant désormais sous contrôle, visiblement les nerfs l’étaient autant. Région et municipalité ont également dépêché sur place leurs camions-citernes emplis d’eau, et quant aux avions et à l’hélicoptère, c’est devant la plage, sitôt totalement vidée, qu’ils venaient chercher l’eau de la mer. Les gens observaient, puis au fil des heures, la normalité est revenue. Artémis le plagiste, a mis en marche son générateur pour ses glaçons et boissons, de même que les patrons des cafés et des tavernes. Vers la soirée, longtemps après le départ des moyens aériens, le courant électrique fut rétabli, ainsi que la connexion Internet par le réseau filaire. Les habitants ont été autorisés à retourner chez eux. “On a échappé alors de justesse”, entendions-nous dire ici ou là. Vacanciers comme habitants ont alors repris le chemin de la plage, tout en regardant régulièrement derrière eux, vers la partie de leur montagne, encore en feu. Les véhicules des pompiers ont pu monter jusqu’à une certaine hauteur, ensuite et durant toute la nuit, leurs unités pédestres ont éteint les petits foyers encore vifs un par un.

Beau et alors terrifiant spectacle que celui des “chandelles”... éclairant par dizaines la pente d’en face. La vie a presque repris son rythme, les dégâts ont été mineurs et nous dit-on, à l’origine du sinistre, “c’est un transformateur trop vieux qui aurait explosé sous la chaleur”. Nous n’en savons pas davantage mais cela nous suffit. Vers la fin... du sinistre évité, un gros 4X4 appartenant à l’administration régionale a fait son apparition ; à son bord, un homme et une femme... “habillés comme jadis en Floride”, affirmait Stélios avec tant d’insistance, enfant bien du coin, ayant vécu aux en Floride chez les Gréco-Américains de Tarpon Springs dans les années 1980. Rires.

Camion-citerne. Péloponnèse, juillet 2020

Pompiers. Péloponnèse, juillet 2020

Chercher l’eau de la mer. Péloponnèse, juillet 2020

Voilà pour notre journée... de l’actualité brûlante. Notre Bellerophontès du coin, le nôtre, d’abord indifférent à l’agitation des humains est alors revenu quand l’incendie fut vraiment maitrisé.

Assoiffé, il s’est précipité sur la gamelle que nous avions entre temps penser remplir d’eau.

Retour à l’essentiel, le feu... et l’eau !
Bellerophontès alors revenu. Péloponnèse, juillet 2020

* Photo de couverture: Les moyens aériens. Péloponnèse, juillet 2020