Greek Crisis

vendredi 16 décembre 2016

Hiver de tous les dangers



Hiver de tous les dangers. En plein centre-ville d’Athènes, on peut distinguer ce buste d’un clown en bois sur lequel est accrochée la pancarte suivante: “Mondialisation, la guerre de la paix”. Autant dire... la guerre tout court. Il neige légèrement dans certains quartiers de l’agglomération. Stéréotypes ainsi battus en brèche. Aux immeubles sans chauffage central comme le nôtre, c’est la débrouille, bouteilles de gaz, puis... cheminées réactivées. Imparable symbole... xylophage du ressenti unanime: “Retour aux années 1950”. Enfumage surtout... du nouveau siècle !

De la... liberté. Athènes, décembre 2016

La Région Attique fleure alors ce nouveau smog, irrespirable de nuit, et cela je dirais cependant moins... que les “autorités”, lesquelles invitent sans cesse la population à modérer l’usage du bois devenu principale solution en termes de chauffage. Tout part en fumée aux dires des Grecs, et tout est dans l’air du temps, confusion comprise. Maigre consolation, ces dernières années, l’usage du chauffage au gaz naturel (gaz de ville) progresse lentement mais sûrement. Sans la crise, il serait sans doute mieux répandu. Or, c’est le coût de l’installation qui freine son développement.

Contrairement à un certain état passé raisonnablement récent, on sent enfin que l’équilibre collectif devient à son tour précaire, faisant “mécaniquement” suite à la précarisation galopante de chacune des existences et des habitants au pays de la Troïka réellement existante. Sauf que parfois, les pires des illusions finissent par se dissiper, surtout après une saignée. Et alors “offrir de la liberté” à boire ou à diluer dans l’alcool s’adressant aux derniers jeunes restant au pays n’y changera plus rien.

Jeudi 15 décembre, de nombreux retraités venus de toute la Grèce ont manifesté au centre-ville d’Athènes... contre la mise à mort apparaissant comme lente (et en réalité rapide) des retraites grecques. Ils ont même parodié le “geste” d’Alexis Tsipras... en distribuant aux passants de faux billets allemands (euros). Pour ce qui est du “geste”... “Jeudi 8 décembre au soir, le premier ministre grec, Alexis Tsipras a annoncé un véritable " cadeau de noël " aux retraités. Un chèque compris entre 300 et 850 euros sera ainsi versé le 22 décembre prochain à 70 % des pensionnés qui touchent moins de 850” et ainsi la bonne analyse de Romaric Godin. Sauf que cette... prime exceptionnelle pour les retraités, n’y peut plus rien ; la popularité des Tsiprosaures est en chute libre.

Ce nouveau smog, irrespirable de nuit. Athènes, décembre 2016 (presse grecque)

La précarisation galopante des existences. Athènes, décembre 2016

Retraités manifestants. Athènes, le 15 décembre (presse grecque)

Retraités manifestants et faux billets. Athènes, le 15 décembre (presse grecque)

Retraités manifestants et faux billets. Athènes, le 15 décembre (presse grecque)

Faux billets d’euros, vrais-faux billets bientôt (?), fausses nouvelles, journalisme souvent... ajourné, politique factice, et élections à venir sans avenir, voilà pour l’air du temps. Même la presse pro-SYRIZA à l’instar du “Quotidien des Rédacteurs” représente dans un dessin ce Pinocchio menteur devant la résidence du Premier Ministre, à l’occasion du récent déplacement du “chef de l'exécutif” à Cuba. Dire en Grèce en ce moment qu’Alexis Tsipras est un menteur, voire un escroc (déjà) politique relève alors du truisme.

Le truisme et tout autant l’évidence en Grèce, tient autant du rôle incarné par les banques et par leur régime “paracratique” hybride dans la mise en place du totalitarisme actuel. Et en dépit des efforts... culturels de l’Institut Goethe dans cette Union Germanochrome Européiste (et non pas Européenne pour être exact), “Everything is game”, non, tout n’est pas un jeu. Sur un mur d’Athènes, près de deux boutiques définitivement fermées le slogan est sans appel: “Aucun espoir”. Vraiment ?

Dans Athènes toujours, on peut se féliciter déjà de la fermeture définitive de certaines enseignes vendant aux (nombreuses) personnes “idiốtês”, c’est-à-dire privées des produits financiers et autres hystéries du genre. Car parfois les mots véhiculent un sens bien philosophique. Du latin “idiota” (“inexpérimenté”, “inhabile”, “sot”) ; du grec ancien “idiốtês”, alors “homme vulgaire, sans éducation, sot, qui ne participe pas à la vie politique de sa république”. Leur temps est finissant, espérons-le en tout cas... et cela plus rapidement que le nôtre.

Alexis Tsipras... Pinocchio menteur. “Quotidien des Rédacteurs”, décembre 2016

Fermeture définitive, enseigne vendant des produits financiers. Athènes, décembre 2016

“Aucun espoir”. Athènes, décembre 2016

Dans les rues d’Athènes, les consciences courent enfin plus vite que d’habitude. Il était grand temps. Entre précarisation galopante pour chacune des existences, puis nos affiches suggérant... que nos philosophes et penseurs, tels que l’Hypatie, Socrate, Pythagore, Platon, Giordano Bruno ou Níkos Kazantzákis, seraient... toujours “Recherchés”, il y a que les apparences qui renvoie (pour l’instant) à une certaine normalité, les “idiốtês” en plus. Sauf que l’histoire n’a jamais bifurqué en faveur des peuples grâce à ces derniers, et encore moins par ces politiciens opportunistes des fins de mois bien arrondis... et micro-noétiques de surcroît, à l’image d’Alexis Tsipras pour ne pas le nommer.

Le temps où nous luttions... seulement contre l’austérité, si chère certes à Wolfgang Schäuble et au FMI (en dépit des supposées divergences entre les deux) se trouve bien derrière nous. Car (et cela est autant un avertissement pour tous les peuples... de gauche comme de droite, demeurant à l’intérieur du système concentrationnaire économique, culturel, symbolique et politique de la dite Union Européenne) ; nous faire croire qu’il suffit de lutter contre “l'austérité”, relève également de la dystopie sémantique issue de la novlangue imposée par les dominants. Et l’on peut perdre ainsi de nombreuses années... avant de réaliser que le Grand jeu, à savoir, la guerre hybride et de fait totale, entreprise contre la souveraineté des peuples et des nations en Europe et évidemment ailleurs. En somme, contre leur (ultime ?) existence... avant le métanthropisme.

Banque. Athènes, décembre 2016

Justement, avant le métanthropisme, le système inventera et réinventera mille fois... Noël, les fêtes, le Père Noël de Coca-Cola et que sais-je encore, à l’instar des municipalités agissantes, où, comme par exemple à Athènes et sous l’enseigne évidemment des sponsors, “l'édition de Noël du marché des aliments” est montée de toutes pièces place de la Mairie. Entre le siège (hasard ?) de la Banque (ex) Nationale de Grèce, et l’Hôtel de ville.

De même qu’à Trikala, en Thessalie, où dans sa version locale des faits et des “fêtes”, on mélange alors volontiers... la feta aux timbres des niaiseries musicales des chansons de Noel américains et allemands que les haut-parleurs municipaux diffusent alors du matin au soir au centre-ville. Sans compter sur cet autre bruit... hypomusical, diffusé sans interruption dans les cafeterias, magasins, superettes... pompes à carburants. Pauvre monde déjà mort... car suffisamment acculturé, cependant, pas tout à fait.

Philosophes et penseurs... toujours “Recherchés”. Athènes, décembre 2016

“L'édition de Noël du marché des aliments”. Athènes, décembre 2016

Trikala, en Thessalie, version locale des “fêtes”. Décembre 2016

Trikala, en Thessalie, version locale des “fêtes”. Café, décembre 2016

Pauvre monde, nécessairement déjà mort... car suffisamment acculturé, mais pas tout à fait. Nous autres ici (et ailleurs), consciencieux du temps, des peuples comme de leur dignité tout de même, nous n’avons rien, mais vraiment rien à fêter. Lorsque notre situation le permet, nous stockons plutôt de la nourriture conditionnée afin de pouvoir tenir quelque temps en cas d’urgence, d’effondrement... de guerre même (encore... plus) ouverte.

La prétention entière des politiques (dites simplement d’austérité) ainsi menées en Grèce par la Troïka depuis 2010, avec l’aimable participation des politiciens d’Athènes et de Béotie, avait été de “préparer” le pays à son sort de nouvelle colonie germano-européiste, de zone tampon, de territoire cédé et administré depuis l’étranger (de manière beaucoup plus visible que par le passé pour tout dire). Une situation préparée de longue date lorsque l’escroc de Premier Ministre germano-compatible Kóstas Simítis, avait engagé (ou avait été engagé par Goldman Sachs... celle de l’actuel employé polyvalent José Manuel Barroso, c’est selon), pour “cuisiner” les données économiques du pays et ainsi le livrer tout nu, à l’univers concentrationnaire de la zone euro, voir même dans la presse mainstream comme “Le Monde”.

Vitrines vides, ou en réalité fêlées d’un capitalisme cadavérique, temps de chien. Ou sinon, comme le suggère une affiche ayant fait son apparition récemment sur les murs d’Athènes: “Théâtre et Pouvoir”. Sauf que l’analyse, même (parfois) publiquement prononcée à travers certains médias traditionnels en Grèce ne peut plus... ne pas être cynique, temps de chien oblige !

Au sujet du problème lié à l’arrivée (programmée) de tant de migrants et de réfugiés en Grèce ces derniers mois et stigmatisant le non-contrôle des frontières du pays, et en même temps les violations quotidiens des espaces maritimes et aériens grecs par les forces armées de la Turquie, l’analyste et journaliste de l’émission de géopolitique (d’une durée de 4h !) dans la nuit du 15 au 16 décembre à la Radio 90,1 Fm du Pirée, n’a pas voulu avaler sa langue:

Nous travaillons alors pour le bordel de Merkel (l’UE), c’est elle la maquerelle (sic) de ce bordel, et c’est toujours elle qui décide enfin sur ceux que nous devons y faire entrer ou pas. Voilà donc l’UE, voire, l’OTAN. Face à eux nous nous écrasons et nous n’avons que de devoirs. Pour ces organismes alors il n’y a même pas la moindre déclaration disons timide, sur la protection des frontières de notre pays face à l’agressivité de la Turquie entre autres. Frontières supposées dessiner d’ailleurs les limites externes de l’UE. Foutaises”. C’est alors ainsi que les jours du ‘politiquement correct’ de la novlangue imposée par les dominants, sont définitivement comptés.

Vitrines vides. Trikala, décembre 2016

Vitrines en réalité fêlées. Athènes, décembre 2016

Temps de... chien. Trikala, décembre 2016

“Théâtre et Pouvoir”. Athènes, décembre 2016

Car, il y a ce qui ne se dissimule alors plus. Comme je l’ai dit lors d’un enregistrement récent (par téléphone) à l’émission de Jose Manuel Lamarque sur France-Inter (l’émission sera programmée je crois prochainement), il y a un risque “d'épisode chaud” (de guerre ou “guerre” ?) entre la Grèce et la Turquie étant donné que le personnel politique de ce pays (son Président en tête) s’amusent à présenter publiquement par exemple toute... une liste d’îles grecques à conquérir, ou déclarent que la situation découlant du Traité de Lausanne n’a plus lieu d’être.

Les événements pourraient se préciser... dans ce sens, et l’on croit savoir (émission de géopolitique dans la nuit du 15 au 16 décembre à la Radio 90,1 Fm du Pirée) que les éventuelles carences en pilotes de l’aviation militaire de la Turquie liées au fait que de nombreux officiers et pilotes du pays se trouvent en prison depuis le putsch manqué contre le Président de la Turquie, eh bien à la limite ses carences pourraient être comblées par de pilotes pakistanais, “Car nous avons déjà vu de pilotes du Pakistan opérant en mer Égée à bord d’avions militaires de la Turquie” (Radio 90,1 Fm).

Détails certes, néanmoins indicatifs du climat grec actuel, au-delà de l’hiver comme autant de ses incontournables “idiốtês”, finalement de toute saison. “Mondialisation, la guerre de la paix” !

À Trikala, comme ailleurs en Grèce, un certain cinéma affiché nous nous invite à découvrir ce dernier “Premier Contact” (‘Arrival’) où douze mystérieux vaisseaux extraterrestres apparaissent subitement dans l'atmosphère terrestre, et dans l’atmosphère de la ville, ceux du SAMU rescapé offrent des cours de secourisme, pendant que les vendeurs de billets de loterie, souvent retraités font miroiter l’ultime du secourisme économique... le leur.

“Premier Contact” (‘Arrival’). Trikala, décembre 2016

Ceux du SAMU... rescapé. Trikala, décembre 2016

Vendeurs de billets de loterie. Trikala, décembre 2016

Vendeurs de billets de loterie. Trikala, décembre 2016

Le temps actuel, c’est enfin aussi ce Putsch en plein développement en ce moment pour ainsi mettre fin à l’existence de la République de Chypre, sous prétexte de trouver une “solution” au problème dit Chypriote. Sans façon, il s’agit du ‘plan Annan’ (2004) réchauffé, et il faut ici rappeler que la surreprésentation politique de la population chypriote turque par rapport à son poids démographique (18% avant l’invasion de l’armée turque en 1974 et l’occupation de la partie Nord de l’île), prévue par le plan Annan, fut l’un des motifs de rejet de la part des Chypriotes grecs lors du référendum de 2004.

En cas d’application, ce plan créera une entité bien étrange, une tératogenèse de plus, semblable à aucun autre état dans le monde (sauf probablement la Bosnie ou le Timor oriental). Le plan prévoit la création (dans une île relativement petite) de diverses chambres, parlements et sénats, avec un système de vetos continus, qui garantira des emplois à de milliers d'avocats et l'impossibilité de ce nouvel ‘État’ de fonctionner. Les architectes du plan le savent, pour cette raison, ils ont laissé le droit de la décision définitive aux étrangers (ou encore, ils discutent maintenant sur un système équivalent à la prise des décisions par tirage au sort). Le monde... et la géopolitique comme dans un verre d’eau ! Le nouvel État ne disposera pas d'armée propre, mais d'une sorte de police internationale pour discipliner les habitants. Ce projet constitue une violation majeure de toutes les dispositions importantes de la Charte des Nations Unies, du droit européen, international et constitutionnel. Ce monstre juridique puise sa légitimité... d’abord dans sa propre logique, et cette logique prétend résoudre le conflit entre la majorité et la minorité à Chypre pour transformer un État indépendant, souverain et démocratique, en une sorte de protectorat postmoderne.

Les peuples... et la vie dans un verre d'eau. Grèce, décembre 2016

Atmosphère de... fête. Athènes, décembre 2016

Mon ami d'école... Kóstas. Décès, Trikala, décembre 2016

Aux dernières nouvelles (les ‘grands’ médias en Grèce ne laissent filtrer presque rien), les auteurs du crime commandité par les Puissances (européisme + Grande Bretagne), poussent les exécutants Alexis Tsipras et surtout Nikos Anastasiádis (Président Chypriote) à signer l’accord avant la mise en place de l’administration Trump aux États-Unis. Comme à Chypre il y a déjà de nombreuses réactions qui rejettent cette “Confédération”, le Coup d’État consiste à doter de ce premier accord d’une valeur juridique (ce que le Président Anastasiádis n’a pas car il s’agit de la dissolution de l’État qu’il préside), le tout, en évitant et en court-circuitant la tenue d’un nécessaire referendum à Chypre.

L’Église grecque à Chypre appelle le peuple à manifester et à s’organiser, d’autres mouvements, issus de jeunes gens surtout, prônent enfin la solution au problème dans le cadre d’un nouvel état unique (et non pas faussement confédéré), évidemment avec les concitoyens Chypriotes-turcs, avec lesquels le contact a enfin été établi pour une action concertée dans le futur proche (Radio 90,1 le 16 décembre).

Mon ami d'école... Kóstas avec qui j’avais parfois partagé le même banc au lycée, ne connaitra plus la fin de l’histoire ou en tout cas de cette histoire. Disparition, décès comme on dit, un jour ensoleillé à Trikala, ville de Thessalie. Retour dans un sens aux... fondamentaux.

Nous avons bu un ouzo à sa mémoire. Trikala, décembre 2016

Vie ordinaire... sauf pour le chat. Thessalie, décembre 2016

Car mes cousins et du coin et de Trikala m'avaient invité pour un apéritif dans leur cour, ils ont préparé un barbecue et c'est pour échanger comme je ne les vois pas souvent. Parmi eux, le cousin Takis, très appauvri et au chômage chronique depuis la dite crise. Takis, ne pouvant pas apporter de la viande comme Vassílis qui invitait, il était un peu gêné.

Takis, en retirant son morceau de viande du barbecue, il... lui est tombé des mains par terre. Takis désespéré et prononçant injure sur injure, a tenté à le nettoyer de la poussière. Impossible. Vassílis lui a donné un autre morceau, et le morceau ayant été tombé, il a été jeté au chat qui rodait alors autour du barbecue. La scène aurait été banale en d'autre temps, sauf qu'elle ne l’est plus. Vie ordinaire au village thessalien... sauf pour le chat !

À Trikala, comme ailleurs en Grèce, on découvrira toujours ce “Premier Contact” où tant de mystérieuses créatures terrestres nous observent alors stupéfaites. Hiver de tous les dangers. “Mondialisation, la guerre de la paix” et “Retour aux années 1950”. Enfumage de nouveau siècle ! Nous sommes prévenus... et nous n’avons pas tant de choses à fêter cette année.

Ces mystérieuses créatures terrestres qui nous observent. Trikala, décembre 2016




* Photo de couverture: “Mondialisation, la guerre de la paix”. Athènes, décembre 2016