Jours d’ultimatum, temps des extrêmes. Athènes sous 35 degrés et réunions de crise, kairós. “Nous n'avons pas le droit d'enterrer la démocratie sur le sol ou elle est née. Ce n’est pas une affaire de blocage idéologique, cela concerne la démocratie. Nous attendrons avec patience jusqu’au moment om les institutions adhérerons au réalisme”, déclare Alexis Tsípras lundi matin au “Quotidien des Rédacteurs”. Ambiance garantie.
L'Acropole. Athènes, juin 2015 |
Le pays se préparerait au pire ou... au mieux ! “Ne pas parvenir à un accord avec les institutions nous mènera dans des eaux totalement inconnues ; tel est l'avis des économistes SYRIZA”, a déclaré un député SYRIZA lors d’une réunion publique et ouverte à tous qui s’est tenue dimanche (14 juin) au soir dans un quartier d’Athènes.
Le principal intervenant était Tássos Koronákis, secrétaire général SYRIZA, pour qui, l’intransigeance des créanciers de la Grèce s’explique par la crainte de voir d’autres peuples d’Europe contester les politiques de rigueur. Atmosphère électrique et crispations entre les différents courants. “Qu'allez-vous faire des responsables politiques du mémorandum ? Ils ont provoqué des milliers de suicides. Ces gens... il faut les pendre”, a-t-elle lancé une retraitée. “Nous ne pendrons personne”, a répliqué une députée SYRIZA et la retraité... a aussitôt quitté les lieux.
Tássos Koronákis, paraissait bien préoccupé d'une seule pensée, celle du jour et de la soirée qui n’avait rien d’un Grand Soir. Les négociations entre la Grèce... Tsipriote et les institutions venaient tout juste d’être interrompues à Bruxelles, “le piège s'est refermé sur la Grèce”, hurlent depuis haut et fort les medias mémorandistes. “Il faut enfin oser la rupture contre l'hybris. Tsípras ainsi que nos négociateurs doivent s’armer de notre culture et affronter les créanciers - rapaces... disposant d’Aristote sous la dent. La peur doit être brisée” a aussitôt lancé un habitant du quartier et écrivain, il a été très applaudi.
Tássos Koronákis, secrétaire SYRIZA. Athènes, le 14 juin |
Athènes, juin 2015 |
Grèce antique comme Grèce critique. Dans les supermarchés et cela tout... gentiment, les Athéniens optent pour des achats... alors durables: riz, pâtes, eau en bouteille, conserves et huile d’olive. Disons que c’est pour passer le cap de l’été ! Voúla, ma cousine pharmacienne évoque les craintes de notre autre cousine Dora, elle regarde trop la télé, elle s’est donc dépêchée afin de constituer ses stocks en huile d’olive car “on peut manquer de tout, mais pas de l'huile d'olive !”.
Quoi qu’il arrive, nos plages se remplissent et nos banques se vident ! Les... créanciers institutionnalisés se tirent les cheveux, “les Grecs n'ont rien fait pour mettre en place les contrôles nécessaire quant à la circulation des capitaux. Mais voilà que toutes les mesures techniques préparatoires sont enfin mises en place... au cas où”, croit révéler le quotidien “Kathimeriní” du 14 juin. Déjà, je scenario à la chypriote semble impraticable. On ne pourra saisir une partie des dépôts car ces dépôts... n’existent pratiquement plus. Les banques grecques sont mortes, la BCE y disposerait des cadavres et alors certains chez SYRIZA osent rêver enfin de la création d’une nouvelle banque du développement hors contrôle de la BCE. Réalisme ou illusion ?
Les plages grecques. Juin 2015 |
Souvenirs pas chers. Athènes, juin 2015 |
Pâtisserie grecque. Athènes, juin 2015 |
Ambiance encore et toujours. Des retraités... très voisins, c’est à dire venus de la belle Italie, nous questionnent avec insistance sur la situation. “Alora, drachma ante portas ?” Et personne ne peut répondre. Pâtisserie grecque et tarte à la crème européiste, tout le monde en est épuisé, les brisés d’abord, dont nos amis Italiens.
“Les créanciers ont dynamité les négociations en exigeant notre capitulation sur toute la ligne”, martèle le site de la mouvance de gauche chez SYRIZA, sondages à l’appui: “53% des électeurs SYRIZA se préfèrent la rupture, seulement 34% seulement sont favorables à l'aboutissement d'un accord”, les consciences alors décampent !
Librairie thématique. Athènes, juin 2015 |
Commémoration, 50 ans après la mort de Fótis Kóntoglou. Athènes, juin 2015 |
À Athènes sous le soleil et sous l’euro, on peut cependant commémorer et surtout se souvenir de Fótis Kóntoglou, peintre né à la fin du XIXe siècle en Asie Mineure et réfugié en Grèce en 1922. Il sut utiliser l'influence de l’héritage byzantin dans sa peinture car il appliqua ainsi les thèmes byzantins à des sujets dits laïcs, c’est à dire populaires (forcement... naïfs).
En 1933, le gouvernement égyptien l'invita à travailler au Musée copte. En plus de ses tableaux, il publia plus de 3 000 articles, “luttant de façon incessante pour l'Orthodoxie et la Tradition grecque”, d’après ses biographes. Souvenirs alors réactualisés ?
Monument du premier gouverneur de la Grèce. Póros, juin 2015 |
Vestiges de l'arsenal de la flotte russe. Póros, juin 2015 |
Míkis Theodorakis, déjà grand compositeur, dans un texte diffusé ce week-end, appelle “à la création d’un nouveau mouvement EAM”, Front National de Libération (grand mouvement de la Résistance lié au PC grec durant les années 1940).
Il a également souligné, que “le peuple découvre soudain que SYRIZA se transforme en une composante de ce Parlement alors blâmable. Le peuple est donc depuis comme tétanisé, déçu, et donc, plus personne ne manifeste dans les rues. La certitude de la victoire du peuple doit être fondée désormais sur les principes suivants: d'abord, l’organisation d’un Front patriotique et social à la manière d’EAM. Deuxièmement: l'exploitation de notre richesse nationale et troisièmement: les alliances nouvelles avec les États comme la Russie et la Chine, ces derniers nous traiter de façon égale et non plus hostile, comme cela est le cas depuis 1821 (indépendance de la Grèce) avec nos... amis implacables (puissances de l’Europe Occidentale) ; car ces derniers nous traitent alors comme leur colonie”. Voilà encore pour une... certaine ambiance à Athènes.
Sur l’île de Póros en tout cas, sur les lieux de l’ancien arsenal de la flotte russe, le monument dédié à la mémoire du premier gouverneur de la Grèce Ioánnis Kapodístrias, est laissé à l’abandon. Mort assassiné à Nauplie, en Grèce, le 9 octobre 1831, il fut tour à tour membre du gouvernement de la République des Sept-Îles (1802-1807), diplomate au service de l'Empire russe (1808-1815), ministre des Affaires étrangères du tsar Alexandre Ier (1816-1822) et gouverneur de la Grèce indépendante (1827-1831). C’était certainement jadis.
Plus près de nous, une certaine Grèce, commémore cette semaine notre autre grand compositeur de la modernité, Mános Hadjidákis, décédé le 15 juin 1994, observateur infaillible de son temps et déjà du nôtre. “Pour ce qui est de l'Europe unie, j'espère pour ceux qui viendront après nous, que nous serions gouvernés par une communauté des vieux sages et non pas... par la sainte famille apostolique du Prince Frankenstein”, avait-il déclaré quelques années avant sa disparition. C’est déjà fait la dette souveraine en plus.
“Nous avons présenté des propositions de compromis, nous attendons désormais l'invitation de la part des institutions pour poursuivre les négociations et aboutir”, croit encore rappeler dans un communiqué officiel la Grèce du bureau d’Alexis Tsípras.
Ma cousine pharmacienne, pense que “c'est certainement fichu”. Ailleurs au pays, on attend tout simplement son poisson... de juin, question de temps et de Kairós !
Ailleurs au pays, on attend tout simplement son poisson. Grèce, juin 2015 |
* Photo de couverture: Mános Hadjidákis, 1925-1994