Greek Crisis

mercredi 10 septembre 2014

Tempêtes



L’automne nous rattrape déjà. Ses prémisses, amplement discutées, davantage que la politique, indiqueraient autant l’horizon à leur manière. Tempêtes en mer comme sur la terre de notre pays, qui n’est plus nécessairement si ferme. C’est aussi en ce moment même et disons choisi, que le système de santé est sur le point d’être de privatisé de fait. Ainsi, la mise à mort potentielle, lente et aucunement fortuite de la population, est... exécutée par le personnel “politique” qui gouverne. Temps certainement tourmenté.

Rue d'Athènes, septembre 2014

Pour mercredi donc 10 septembre, les syndicats hospitaliers avaient appelé à manifester et à cesser le travail dans l’après-midi. Car d’après le projet de loi présenté par le ministre de la Santé (!) Makis Vorídis, (transfuge relativement récent au parti d’Antónis Samarás depuis l’extrême-droite du LAOS, parti moribond depuis sa participation au gouvernement du banquier Papadémos entre 2011 et 2012), la trésorerie, les recettes, les dépenses, les cotisations des salariés et des employeurs du pays, seront gérés suivant la bien connue rentabilité... entrepreneuriale du grand “risque”.

Précisément, et pour ce qui est du versement des salaires au personnel, il perdra à son tour, tout caractère constant et fixe. Le financement donc, même supposons-le en partie public du système de la santé, ne sera plus sous le contrôle de l’État, mais sous celui d’une entreprise de droit privée. Et d’après ce que nous savons déjà (presse de la semaine), les partenaires du secteur privé de la branche, (cliniques, laboratoires et hôpitaux privés) participeront... autant à la cogestion du système.

Déjà, on suppose que le pouvoir public (?) se désengagera rapidement de sa participation au système prétendu commun de la santé. Et pour commencer, l’État détiendra certes 51% des actions de la nouvelle société, sauf que tout le monde estime que rapidement, l’État va “se débarrasser”, si ce n’est que d’une partie du capital de l’entreprise, (radio 105.5, le 10 septembre).

Mur d'Athènes. “Nous avons faim”, septembre 2014

Dès lors, mardi 9 septembre 2014, le ministère vient d’annoncer la fermetures de certains services, voire de certains hôpitaux, ainsi que la énième réduction drastique des actes médicaux pris en charge par la Sécurité Sociale. Entre autres, de certains examens préventifs, dont notamment les tests de dépistage du cancer de l’utérus (radio 105,5 le 9 et le 10 septembre).

Joint par téléphone, Ilías Sióras, cardiologue et syndicaliste (mouvement PAME, proche du KKE - Parti communiste) a fait remarquer lors d’une émission télévisée (10 septembre, Méga-TV) en présence du ministre Mákis Vorídis, que la raréfaction des dépistages coûteront plus cher au système de santé lorsque de nombreux patients et patientes... y reviendront leur cancer sous le bras. Le ministre certes courtois, n’a pas souhaité répondre sur le fond du raisonnement. En somme pourtant, la réponse est évidente.

Il n’y aura plus de prise en charge des malades, sauf lorsqu’ils pourront financer eux-mêmes les protocoles liés aux thérapies. Sinon ils mourront, comme c’est déjà le cas. Sélection... “naturelle”. Ainsi, et quant au test (pris en charge) de dépistage du cancer de l’utérus par exemple, il sera pratiqué tous les cinq ans au lieu de chaque année. La suite... surviendra. La structure privée alors considérera... aisément, les unités ainsi que les actes jugés “rentables” ou pas, le tout, en “synergie” avec les... compagnons du privé. Effectivement, “synergie” en grec moderne signifie aussi “complicité”.

Immeuble classé à vendre. Athènes, septembre 2014

La politique de Samaras, “Quotidien des Rédacteurs”, le 7 septembre

D’après ce projet de loi, la société privé détiendra l’essentiel du pouvoir décisionnel, au détriment évidemment du ministère de la Santé et surtout, de la santé des forces... encore vives de la nation comme on disait parfois jadis. Les représentants de syndicats, estiment alors que ces critères, dits “de la rentabilité”, sont conformes au cadre global (“rentabilité et concurrence”), imposé par la Commission européenne, le tout, avec la complicité fort active des gouvernements, Troïka ou pas d’ailleurs, pour ce qui relève de la gestion des finances des pays tristement concernée.

L’argumentaire du ministre en Grèce, implicite ou explicite est toutefois implacable. L’État est en faillite, ainsi, il ne pourra pas faire face aux dépenses sociales, ni au financement de la santé publique. Le système actuel doit trouver ses sources de financement ailleurs, et comme le... très bas peuple ne veut pas comprendre et en outre, les syndicats insistent toujours sur le caractère public de la Sécurité Sociale ainsi que sur l’obligation de l’État de maintenir la Sécurité Sociale... il va falloir faire simple et surtout court. Après tout, seuls les plus forts survivront.

Le “gouvernement” transférera donc ce qui reste des fonds propres du système public à la nouvelle société privée, laquelle s’occupera désormais de la gestion du système, ainsi, l’affaire comme son coût, ne seront prétendument plus politiques. Le nouveau gestionnaire et néanmoins quasi-propriétaire réduira les frais et les services à sa guise, tout en exigeant la participation financière accrue des assurés.

Tableau... de la Troïka et des relations entre la Grèce et l’Allemagne. “Quotidien des Rédacteurs”, septembre 2014

L’automne alors... avancera. En attendant, les services Hans-Joachim Fuchtel, notre administrateur colonial Allemand, (officiellement “Beauftragter der Bundeskanzlerin für Griechenland”, représentant du chancelier fédéral pour la Grèce, nommé par Angela Merkel à la tête de “l'Assemblée gréco-allemande”, DGV, “Initiative pour la coopération entre les régions grecques et allemandes, les villes et les citoyens”), viennent d’adresser un formulaire de recensement à tous les maires du pays (s’agissant de la Grèce), nouveaux élus, suite aux élections de mai 2014.

D’après le “Quotidien des Rédacteurs” daté du 10 septembre, ce questionnaire long de huit pages, a comme but d’établir un inventaire détaillé, pour ce qui est de la démographie et des activités des administrés, et autant des services municipaux, des associations alors actives et cela, commune par commune, des infrastructures, et évidemment des... avoirs des municipalités, ainsi que de la manière dont la gestion des déchets fonctionne au niveau local.

Le formulaire en question... met donc l'accent sur “l'identification” des communes: rurales, urbaines, touristiques, ou de montagne, et notamment sur leurs infrastructures, insistant enfin en détail, sur les données démographiques: population, tranches d’âge, population immigrée classée par nationalité, présence le cas échéant d’une population de Roms, puis, de personnes handicapées comme SDF... voilà donc pour la “Liste de Fuchtel”. C’est vraiment surprenant, voire accablant.

Hans-Joachim Fuchtel. “Quotidien des Rédacteurs

L’affaire vient d’être révélée par l’Intersyndicale des agents territoriaux du pays (la... Grèce), POE-OTA, et aussitôt par le reportage publié après enquête du “Quotidien des Rédacteurs”.

Le communiqué publié par POE-OTA est d’ailleurs bien, fort explicite: “M. Fuchtel et les siens, alors soutenu par le personnel politique vassalisé et domestiqué au service des créanciers et servant leurs seuls intérêts, se comportent comme des conquérants de la Grèce actuelle. Ils veulent ainsi connaître en détail le patrimoine et les avoirs de chaque municipalité et de chaque région, l’état des infrastructures, ainsi que la situation sociale et démographique au cas pas cas, et cela, afin d'élaborer leur programme de spoliation des biens publics”. Et du côté de SYRIZA, Kóstas Poulákis, chargé des relations avec les collectivités locales a déclaré ceci: “Il y a des limites. Non Messieurs, nous ne vendons pas...”.

Je note que le pouvoir forcement hétéronome de la DGV, ainsi que la nomination de Hans-Joachim Fuchtel résultent, d’une part de l’instauration en Grèce du régime anticonstitutionnel et antisocial de la Troïka, et autant, de la désastreuse reforme territoriale comme on disait alors en Grèce durant la première année de la Troïka et du mémorandum.

Comme par exemple en France en ce moment (il me semble), les communes ont été regroupées de force et les départements ont été supprimés au bénéfice des régions. Enfin notons, que ce n’est pas la personne de Hans-Joachim Fuchtel ou même sa nationalité qui seraient ainsi visées par notre désapprobation, ni même un certain cadre de coopération entre les pays. Ce qui est alors hautement déterminant dans notre affaire, relève du contexte géopolitique et de la position prédominante de l’Allemagne au sein de l’UE, ni plus, ni moins.

Évasion fiscale à l'allemande. Radio 105.5. Septembre 2014

Curieusement (?), cette nouvelle... affaire allemande, fera suite à l’énorme escroquerie et en même temps évasion fiscale de grande envergure pratiquée en Grèce par les entreprises allemandes, BMW, Mercedes et Opel, affaire révélée par les journalistes de 105,5 FM, de FM Voice ainsi que du “Der Spiegel” côté allemand (Kóstas Arvanítis et Státhis Schinás de 105.5, Yórgos Andrís de FM Voice, Theódoros Kouvákas, collaborateur à Berlin de “Der Spiegel”).

Le fisc grec (SDOE) a déjà infligé une amende globale à l’encontre des entreprises concernées, d’un montant cumulé de 600 millions d’euros. D’après les journalistes de 105,5 FM, l’affaire est restée sans suite, étant donné que les ministres des Finances à Athènes ont exercé des pressions évidentes pour que les établissements concernés ne soient pas... ainsi malmenés par les services fiscaux de la... colonie. L’ampleur de cette évasion fiscale forcement frauduleuse, pourrait atteindre les 4 milliards d’euros, toujours d’après les journalistes qui enquêtent sur ce dossier en tout cas.

Athènes, septembre 2014

Plus précisément, et entre 2009 et 2014 donc, cette évasion fiscale d’envergure, aurait usé du procédé de la sous-facturation, alors pratiquée par les succursales des constructeurs automobiles BMW, Mercedes et Opel en Grèce. C’est ainsi que de nombreux véhicules de luxe avaient été importés en Grèce et facturés 10.000 euros (aux concessionnaires), au lieu de 90.000 à 100.000 euros, évitant ainsi que d’acquitter une TVA... à la hauteur, et au même titre, le versement de la taxe spéciale perçue normalement pour chaque automobile de luxe importée. Dans certains cas, les données constructeur, notamment le numéro de série du moteur... ont été falsifiées d’origine, d’où l’impossibilité de effectuer avec réussite, le premier contrôle technique quatre ans après l’acquisition et la première mise en circulation.

Ch. Kapetanídou, habitante de Thessalonique étant victime d'une telle fraude, elle a saisi les tribunaux grecs après avoir découvert avec surprise que sa voiture, une BMW acheté neuve en 2009, avait été recalée au contrôle technique pour cette raison. Témoignant dans le cadre de l’émission de 105.5 FM du 4 septembre, elle a affirmé qu’en sortant du bureau du juge, elle été frappée par des inconnus, et ensuite hospitalisée.

Touristes navigateurs, Allemands, Néerlandais et Belges en Grèce. Septembre 2014

Appartements à vendre. Agístri, septembre 2014

En attendant les suites de cette affaire, ainsi que l’approfondissement de l’enquête par les journalistes de “Der Spiegel” ; heureusement, rien ne semble entraver l’accueil des visiteurs depuis l’Allemagne, comme pour cet équipage, composé d’Allemands, de Néerlandais et de Belges à bord d’un voilier loué, assistés comme il se doit, lors d’une manœuvre d’accostage et pas uniquement, dans la petite île d’Agístri, près d’Athènes. Et à part les douceurs de la saison, nos touristes découvriront en face du port, ces appartements “in very low price” à vendre.

Impossible pourtant de deviner les latitudes exactes des pensées et des sentiments qui prévalent chez nos visiteurs. Mon ami skipper professionnel bien de chez nous, s’est toutefois permis la remarque suivante, cependant en grec: “Heureux Allemands, visiblement ils sont à la retraite... véritable, sans doute entière. C'est désormais un tout autre univers”.

Mur...grec. Agístri, septembre 2014

L’automne depuis Agístri, septembre 2014

Ravitaillement en carburant près du Pirée, septembre 2014

L’automne nous rattrape déjà et même à Agístri. Les professionnels du tourisme feront bientôt leurs comptes, pas si mauvais apparemment cette année. L’été s’efface, comme notre système de santé ou comme parfois notre drapeau sur les murs délavés de l’île.

Tempêtes en mer comme sur la terre grecque qui en a vu bien d’autres. Étés alors passagers, sous le regard détaché des animaux adespotes (sans maître) ou adoptés.

Animal quasi-adopté. Île d'Agístri, septembre 2014




* Photo de couverture: Tempête finissante près du Pirée. Septembre 2014